Presse L’association a tenu son assemblée générale le samedi 16 mars au siège du journal. Une occasion de repenser son fonctionnement et débattre sans tabou autour du quotidien indépendant, dans la perspective de ses 120 ans.
Chaque année, à la Fête de l’Humanité, l’espace de la société des Amis du journal est un franc succès. Le stand de l’association y est un point charnière pour les débats et les rencontres tant culturelles que politiques. Samedi 16 mars, les Amis de l’Humanité ont tenu leur assemblée générale annuelle au siège du journal, à Saint-Denis, la 29e de leur histoire. L’occasion de rebaptiser l’association, devenue les Ami·e·s de l’Humanité, de dresser un bilan de son activité et de sa situation financière.
D’emblée, le secrétaire national des Ami·e·s et rédacteur en chef Jean-Emmanuel Ducoin a averti l’assemblée qu’il serait difficile de compenser la baisse des adhésions et des dons à l’association, qui s’essoufflent depuis la pandémie. Selon lui, sans relance, les difficultés financières pourraient à terme remettre en question les activités de l’association. « Pour maintenir notre fil d’Ariane, nous avons besoin de relancer une grande campagne d’adhésion, de dons et d’idées neuves, conformes au temps qui est le nôtre », a-t-il poursuivi en égrenant les grands thèmes de solidarité, fraternité, liberté, féminisme, écologie, justice sociale, paix, etc.
Présent, comme tous les ans, à l’assemblée des Ami·e·s, le directeur du journal et sénateur Fabien Gay a fait un point sur la situation du journal, qui reste sous surveillance du tribunal de commerce jusqu’en 2031. S’il annonce pour l’année 2023 un équilibre financier – ce qui constitue un événement marquant –, l’Humanité reste fragile, a-t-il précisé, d’autant que le lectorat de sa version en papier vieillit. Il a cependant relevé que le journal de Jaurès se redresse progressivement, notamment grâce aux dons, au redéploiement de la rédaction, et aussi et surtout grâce à sa révolution numérique. Cette transformation digitale, entamée il y a quelques mois, devrait se poursuivre avec une hausse des abonnements sur le site. Le récent pôle vidéo, par exemple, constitue un vecteur d’attrait pour les jeunes générations. Malgré la hausse du coût du papier et l’inquiétante disparition des kiosquiers, Fabien Gay a tenu à rassurer les Ami·e·s : la presse imprimée « ne sera pas sacrifiée au détriment du numérique », tout en rappelant que les journaux et magazines sont aujourd’hui un « produit de luxe » dans un environnement soumis aux restructurations capitalistiques.
120 initiatives partout en France
Les « forces libérales autoritaires et réactionnaires sont à l’offensive », pointe le sénateur. Ce 15 mars, outre la Provence, BFMTV et RMC sont en effet passées entre les mains de Rodolphe Saadé, patron de CMA CGM. Progressivement, les milliardaires vampirisent les médias. Prenons le cas de Bolloré : à la suite de son rachat de i-Télé, devenue CNews, « moins de 11 % d’information pure est diffusée sur le temps d’antenne (et) l’ensemble de la rédaction a quasiment été liquidée », a critiqué Fabien Gay, inquiet pour le pluralisme médiatique. Si l’extrême droite arrivait au pouvoir, sa première mesure serait de couper les aides à la presse, a averti le directeur. Ce qu’a laissé sous-entendre il y a quelque jours Marion Maréchal-Le Pen sur le réseau social X. C’est donc peu dire que la place de l’Humanité en tant que journal indépendant et engagé dans l’univers médiatique actuel est précieuse, essentielle.
2024 est une année historique puisqu’elle coïncide avec les 120 ans de la fondation du journal le 18 avril, les 110 ans de la mort de Jean Jaurès le 31 juillet et les cent ans de sa panthéonisation le 23 novembre. Pour fêter l’anniversaire du titre, 120 initiatives sont programmées partout en France. Le 20 avril, un banquet se tiendra dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville de Paris, où lecteurs, personnalités politiques, syndicales, associatives et personnels du journal partageront un moment convivial. Jean-Emmanuel Ducoin en a profité pour signaler la sortie en avril d’un livre intitulé 120 ans, 120 Unes, 120 regards et d’un hors-série, « Instantanés d’Humanité ». Avec Fabien Gay, ils se sont également félicités de la réussite des hors-séries sur Lénine et Manouchian. Ces numéros « sont toujours d’actualité et vont continuer de vivre tout au long de l’année », souligne le sénateur. Par ailleurs, les rédacteurs de l’Humanité préparent un futur hors-série sur l’histoire populaire des jeux Olympiques et Paralympiques, après ceux dédiés au football et au rugby.
Depuis la salle, où l’on comptait la présence de l’écrivain Gérard Mordillat, l’ancien secrétaire général de la CGT Philippe Martinez ou de l’historien François da Rocha Carneiro, les Ami·e·s ont interrogé le directeur de l’Humanité, notamment au sujet de la place du PCF au sein des colonnes du journal. « Je suis là pour faire vivre un journal communiste qui s’adresse au plus grand nombre et qui n’a pas peur de la confrontation, du débat, des idées », a réitéré Fabien Gay. Et d’insister : « Regardons ce qui est utile pour le lecteur : il faut lui donner du grain à moudre pour transformer le réel. » Concernant la Fête de l’Humanité, qui se tiendra les 13, 14 et 15 septembre, le directeur s’est dit « extrêmement heureux d’être à la tête d’un événement où l’ensemble de la gauche et des organisations syndicales sont présentes ». Si l’extrême droite n’a évidemment « pas sa place » à la Fête, les autres partis de la gauche « ne sont pas nos ennemis », a-t-il précisé. « Nous ne faisons pas cette Fête pour nous retrouver seulement entre nous. » Une Fête de l’Humanité que chacun espère exceptionnelle, comme celle de l’an passé.
Margot Bonnéry
Ernest Pignon-Ernest réélu président
Plus de 70 Ami·e·s étaient présent·es à l’assemblée générale et au débat de l’après-midi, au siège de l’Humanité.
Ernest Pignon-Ernest, plasticien et académicien, a été confirmé dans sa fonction de président des Ami·e·s de l’Humanité.
Les vice-présidents sont Daniel Herrero, Gérard Mordillat, Charles Silvestre.
Entrent au conseil d’administration : Janick Salvy-Santangeli, Guy Lecroq et Bernard Vasseur.
Entrent au bureau exécutif : Daniel Bouy, Janick Salvy-Santangeli et Guy Lecroq.
Jean-Emmanuel Ducoin, journaliste et écrivain, a été réélu secrétaire national, avec comme adjoints Jean-Yves Flaux et Aurélien Soucheyre.